En guise de mise en bouche

ExempleNeveu de Rameau de Denis Diderot (1772)

Dans cet extrait du Neveu de Rameau[1] de Denis Diderot, Jean-François Rameau, le neveu du musicien (Lui), personnage atypique et dépourvu de sens moral, dialogue avec un philosophe (Moi). Le neveu joue sur la double valeur des expressions, de manière crue...

MOI : Il faut qu'il y ait une certaine dignité attachée à la nature de l'homme, que rien ne peut étouffer. Cela se réveille à propos de bottes. Oui, à propos de bottes ; car il y a d'autres jours où il ne m'en coûterait rien pour être vil tant qu'on voudrait ; ces jours-là, pour un liard, je baiserais le cul à la petite Hus.

MOI : Hé, mais, l'ami ; elle est blanche, jolie, jeune, douce, potelée ; et c'est un acte d'humilité auquel un plus délicat que vous pourrait quelquefois s'abaisser.

LUI : Entendons-nous ; c'est qu'il y a baiser le cul au simple, et baiser le cul au figuré. Demandez au gros Bergier qui baise le cul de madame de la Marque au simple et au figuré ; et ma foi, le simple et le figuré me déplairaient également là.

(...)

D'après cela, le seul conseil que j'aie à vous donner, c'est de rentrer bien vite dans la maison d'où vous vous êtes imprudemment fait chasser.

LUI : Et de faire ce que vous ne désapprouvez pas au simple, et ce qui vous répugne un peu au figuré ?

Très souvent, le transfert de sens fait passer le mot d'un domaine concret à un domaine abstrait.

Dans le texte de Diderot, le sens concret se passe de commentaire, quant au sens abstrait, on peut comprendre « se soumettre à quelqu'un », « s'asservir à quelqu'un »