Les pléonasmes dans tous leurs états
Les pléonasmes ont mauvaise presse, c'est bien connu.
En quoi consiste un pléonasme ?
Le pléonasme est le fait de dire, à tort et involontairement, deux fois la même chose.
Lorsqu'il est produit volontairement, il a souvent un effet d'insistance, il intensifie le discours, comme dans Je l'ai vu de mes yeux pour certifier qu'on a bien été le témoin oculaire d'un événement.
Dans quel cas produit-on « à tort » un pléonasme ? Cette question est plus délicate qu'il n'y paraît, car le pléonasme engage la question des normes et de la relation de chaque sujet parlant avec la représentation qu'il se fait de sa langue.
Et tous les sujets parlants ne sont pas égaux devant les normes... Ainsi, on reprochera l'emploi d'un pléonasme dans un écrit universitaire, mais on s'extasiera devant une trouvaille – fût-elle pléonastique – d'un écrivain.
Exemple :
En voici un bel exemple, tiré de Comment gagner sa vie honnêtement[1] de Jean Rouaud :
Et sans cet esprit d'enfance, qui est la marque de la liberté libre, c'est le sérieux qui domine, autrement dit l'ordre, la loi, l'absence de fantaisie. D'où ce premier signal lumineux à la lecture de son mot : cette femme a la poésie avec elle, cette femme est une merveille.
Exemple :
Avant lui, Rimbaud lui-même louait cette « liberté libre », lorsqu'il écrivait à son maître :
Je meurs, je me décompose dans la platitude, dans la mauvaiseté, dans la grisaille. Que voulez-vous, je m'entête affreusement à adorer la liberté libre (...)
Conseil :
Dans vos écrits, ne jouez pas à l'écrivain : évitez les pléonasmes les plus courants et les plus « visibles ».